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Tu Écriras Sur Le Bonheur

Linda Lê (1999)

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C’est un peu le jardin littéraire de Linda Lê, qui adopte ici le ton de la promenade érudite, pour nous donner à partager ses lectures. Sereine, toujours juste dans ses observations, d’Ingeborg Bachmann à Dürenmatt, de Connolly à Bohumil Hrabal, en passant par Klaus Mann, Ernst Weiss et quelques autres, elle dessine un paysage de “sang, de chair et de nerfs”, qui ne sombre jamais dans une perspective douloureuse, bien que le désastre soit toujours proche. L’on s’étonne même de cette langue si raffinée pour l’évoquer. “L’enterrement des étoiles dans la fausse commune” est montré d’un geste nonchalant, avec cette diligence désinvolte du courtisan qui sait tout le talent qu’il faut déployer pour faire face à l’idiotie du réel. Mais curieusement, c’est dans la compagnie de Paul Nizon que son écriture fléchit. Or c’est à une phrase de ce même Nizon que son livre est adossé : “Tu écriras sur le bonheur”. Une stèle, l’épitaphe d’un marbre où le bonheur d’écrire viendrait se rompre, le feindrait dans la raillerie du vouloir écrire sur le bonheur. Nizon, en quête de l’harmonie retrouvée et sans cesse reléguant cette quête pour que l’écriture puisse s’installer dans son impossible franchissement. “Vouloir écrire sur le bonheur, c’est vouloir attendre la floraison d’un cactus”, nous dit Linda Lê. Sans doute. C’est déplacer la justification de ce vouloir, entretenir en quelque sorte la machine à écrire pour en libérer les rouages, avec, encore une fois, cette maturité du courtisan qui sait de quelles impuissances relève l’économie de la jouissance. La tâche de l’écrivain, écrit-elle plus loin dans un ultime texte où il est question de l’identité qu’on voudrait lui voir endosser, est de produire “une parole déplacée, puisqu’elle se place au cur de la douleur sans chercher à lénifier cette douleur avec la panacée des mots”. Pour qui refuse à l’art son pouvoir de célébration, ou de consolation, cette assertion ouvre tout de même un bien paradoxal chemin : celui de l’exil reçu comme croix et comme bénédiction. Sans doute tout écrivain doit-il s’exiler dans sa langue, surtout si elle est maternelle, pour ne pas sombrer sous le poids de son langagier. Qu’il se mette en route ne commande pour autant pas ces détours incertains et pour tout dire, trop habituels dans le contexte de la littérature française. Gombrowicz parcourut joyeusement dans sa langue maternelle un chemin non nécessairement pavé d’épines. Dépouillé du martyrologue polonais, pour paraphraser le tchèque Ladislav Klima, il était passé maître dans l’art de tout amocher. Le devait-il au seul génie de sa langue ? Rabelais en fit autant dans la nôtre, pourtant si réfractaire à l’amochage public. L’impeccable français de Linda Lê témoigne peut-être encore d’une inquiétude. Elle s’est chargée de l’inconvenance d’une parole retournée contre soi, mais elle hésite à renoncer à la consolation d’une écriture bien faite -pour évoquer ici non sans vulgarité l’idéal romantique de l’art poétique, balançant sans cesse entre le banal et le sublime. Romancière, critique, elle est tout de même un très grand écrivain !–Joël Jégouzo– – Urbuz.com

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